Respec-tueuses salutations !
Ah l’Australie !
Quand j’étais
petit (voilà six décennies quand même), c’était mon rêve. Je m’y
voyais chercheur d’or, de diamants ou d’opale. Mais à l’école
la maîtresse disait que ce n’était pas si facile. Fallait creuser
plein de trous dans une terre très dure et sèche ; qu’il y
avait des araignées, des scorpions, des animaux qui auraient fait
peur aux dinosaures. Elle m’avait terrifié la diablesse, j’en
faisais des cauchemars dantesques . Puis, c’est elle qui y est
partie.
Mais revenons à nos
white sheep - moutons blancs australiens in the text.
Pour y parvenir, le
voyage s’est pas trop mal passé. J’arrive direct de la Nouvelle
Zélande, mais comme je suis pas vacciné, je suis arrivé de
nuit, tenue commando marine et … en barque . Ramer, ça m’fait pas
peur puisque je rame depuis ma naissance, mais tirer en plus la
caisse sur un radeau, ça fatigue son homme. Et 4033,36km
(distance la plus courte que j’ai trouvé), faut s’y prendre de
bonne heure, et c’est éreintant j’ vous assure. Je comptais
avoir une nuit de sommeil à mon arrivée et me refaire une santé,
mais les vicelards d’orga en ont décidé autrement. Dès la nuit
suivante, me voilà au volant.
Comme toujours, un
setup trouvé sur le oueb, légèrement adapté à ma conduite de
malade ; pas de reco – j’ai pas l’temps pas l'envie ; 2 – 3
shakedown, plus shake que down d’ailleurs, et quelques cachous
avant le départ. Me voilà prêt…
ES 1 :
D’entrée, j’enfonce le champignon : mon Dieu que ça va
vite ! Fin de premier secteur je n’ai que 0,18s de retard sur
le 1er . Wahooo, les cachous font effet !
Mais les phares se
mettent à déconner. C’est plus des phares, c’est des warning !
Bon sang, ça clignote plus noir que clair. Je ferai peut être mieux
de les couper direct, mais le bouton n’a pas d’effet. J’y
verrai mieux avec des lunettes de soleil sûrement. Obligé de faire
gaffe jusqu’à la fin.
A l’arrivée, déjà 8s
de perdues sur le 1er ( 7Zorn).
ES 2 :
Rebelotte, je pars comme un dératé , mais cette fois, j’ai pas
fini le 1er secteur que je prends un soit disant 4G trop
large. Sortie de route, je fais une bise aux barbelés et je
m’immobilise contre un arbre qui , visiblement jaloux, venait
gentiment à mon secours. Marche arrière… avant... arrière.
Putain j’en sors pas ! Je me libère de l’étreinte du
végétal et me voila reparti .
Ouf ! pas de
crevaison, pas de problème moteur … Le cierge que j’ai mis à
Notre Dame de la Garde avant de partir en NZ aurait-il fait effet ?
C’est vrai qu’il
a mis le temps, mais Australie-Provence, c’est pas la porte à
côté, ni la porte à côté de la porte à côté...
Pas de temps de
m’interroger sur la question. J’ai compris l’avertissement du
divin et je me calme un peu. En plus les cachous font plus trop
effet. J’arrive à l’arrivée (c’est con comme phrase non ?),
mais le chrono est loin d’être extra. Le pare brise est méchamment
fissuré. Si j’osais, je dirais qu’il ressemble au cul d’un
vieux travelo tout droit sorti du bush .
Euh, finalement, j’ai
osé ...
ES3 :
Chandlers Creek. Ça veut dire Crique des Chandeliers non ?
Si c’est le cas,
avec mon cierge j’ai tout bon !
En fait, c’est pas
tout bon du tout. Dès le départ le copil fait des siennes :
les annonces sont plus que tardives ; on n’a pas pris les
mêmes cachous. Il dirait rien que ce serait pas plus mal. J’ai
l’habitude depuis les USA où j’avais fini par le virer, mais là
il fait contrepoids dans les virages à droite alors cette fois, je
le garde. En plus il a grossi l’outre à vinasse, limite bouffi.
C’est pas folichon
comme ES, mais j’arrive étonnamment au bout sans pépins .
ES4 /5
: Le copil continue ses embrouilles et le pare brise se fissure de
plus en plus. Là, j’ai plus de comparaison. D’ici qu’il pète
pour de bon, ça m’est jamais arrivé, mais on sait jamais. Du
moment que j’ai pas les odeurs ! Les secousses augmentent, la
voiture a du mal à rester sur la piste, la faute aux pneus
certainement.
Mais putain de pays, je comprends que les mecs y
roulent qu’en 4x4 ou à dos de chameau !
Petite parenthèse :
Et oui, il y a plein de chameaux – des dromadaires en fait – en
Australie. Et ce sont eux qui tracent les pistes (c’était la
minute culture ).
Retour au rallye :
par rapport au 1er passage, je perds sur ces deux ES
environ 25s. Heureusement l’assistance est là, je vais pouvoir me
reposer un peu .
Les mécanos
réparent tout, une petite sieste et c’est reparti.
ES6 : Je
suis encore endormi. J’y suis pas. Chrono plus que moyen .
ES 7 :
Les ennuis commencent. Le moteur me semble avoir perdu de la
puissance sans raison. 2 petites touchettes arrières contre la
montagne, et un chrono raisonnable (5e temps provisoire
sur cette ES) .
ES 8 :
Autant lorsque je faisais du vélo, je m’éclatais dans les
descentes, autant en voiture c’est pas l’pied. Obligé de sortir
à plusieurs reprises les aérofreins pour éviter des catastrophes
sur les parois rocheuses . Les pneus doivent certainement ressembler
au pare brise.
Si ça continue je
vais finir dans un vrai trou de balle .
ES9 : La
puissance moteur est revenue. Heureusement, ça monte. Je ne perds
que 30s sur le 1er , malgré un tout droit qui me coûte
quelques secondes et un pare brise que je qualifierai de ... « analesque ».
ES10 :
Pfff encore une longue descente. Bis repetita . Aussi nulle que la
première. En draisienne, j’irai plus vite . En prime, la voiture
tourne de moins en moins, les « tout droit »
s’enchaînent. J’avance si lentement que les arbres me
rattrapent. Cette fois c’est pratiquement 1mn de perdue sur la
tête . Pour me calmer, je mets 2 beignes au copilote qui attend les
virages passent pour me les annoncer. Faut dire que ce con, il a
rempli son roadbook à l’encre sympathique, et donc les pages sont
vierges. Pour pas que les autres équipages voient les notes qu’il
dit !
Lui, c’est
vraiment ma croix, et brûler des cierges c’est pas suffisant .
Dernière
assistance. La voiture est en vrac. Je ne peux réparer que
partiellement et encore tout ce que je peux en « réparation
rapide ». Tant pis, je vais finir avec le pare brise toujours
dans le même état.
Avant le départ, j’accentue le carrossage et
je monte un peu la hauteur de caisse.
ES11 :
Je veux pas griller la caisse avant la dernière. Vu la distance
qu’il reste, je ne prends qu’1 RS. J’assure quand même un peu
et surprise, je ne suis qu’à 4s de la tête .
ES12 :
Mon dernier jour aux antipodes. Départ canon, à mi spéciale, je
n’ai qu’1s de retard !
Je suis à fond et
j’accélère – c’est pas possible je sais – c’est une
image. Dans le 3e secteur, un 3G pas compliqué m’envoie
à l’extérieur. Je reconnais mon arbre favori. Bingo ! Obligé
d’attendre qu’on me remette en piste. Avec la pénalité, plus de
20s de perdues. Encore une fois, j’ai loupé ma PS . Je finis dans
un vrai corbillard , en 1h17'12", avec un retard de 5’42" sur le 1er provisoire.
Et c'était pas fini !
Une fois l’arrivée
passée, une inconnue s’est jetée dans mes bras . C’était mon
ancienne maîtresse d’école. C’est elle qui m’a reconnu. Faut
dire qu’elle ressemble maintenant à la grand-mère de Crocodile
Dundee. Même que ce débile lui a piqué ses dents pour les mettre
sur son chapeau .
Alors, tout bien
réfléchi, c’est décidé, je ne m’installerai pas en Australie .
Merci aux orga pour
cette virée dans le bush, et bonne route aux pilotes. On se revoie
en Pologne.
Pour le retour, je vais me payer un moteur pour ma
barque . La C4, je vais peut-être la laisser aux kangourous .